M. Jean-Michel Jacques attire l’attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les troubles mentaux développés par les futurs et jeunes médecins en France. Une récente étude menée par quatre syndicats d’étudiants en médecine auprès de 22 000 jeunes et futurs médecins relaye que près de 66 % d’entre eux souffrent ou ont souffert d’anxiété (contre 26 % de la population française) et environ 28 % traversent ou ont traversé un épisode de dépression (contre 10 % de la population française). Ces chiffres sont alarmants. L’exigence des études en médecine, la confrontation à la douleur des patients, la pression portée par ces jeunes gens ainsi que le nombre d’heures effectuées dans les structures médicales sont des motifs de souffrance psychologiques pour ces futurs et jeunes professionnels. Aussi, il lui demande les mesures prévues pour remédier à ces constats préoccupants en termes de management, de prévention et d’accompagnement.
Réponse du 02/04/19
Le mal être des jeunes médecins et des internes relève d’une approche bien connue par l’ensemble des acteurs du monde de la santé. En effet, plusieurs enquêtes menées par des syndicats d’étudiants en médecine ont mis en évidence la surexposition de cette population aux risques psychosociaux, en raison des exigences émotionnelles que requiert cette profession, de la complexité des tâches effectuées et de la charge de travail. Le ministère chargé de la santé s’est emparé de ce sujet par l’élaboration d’une stratégie nationale d’amélioration de la qualité de vie au travail (SN-QVT) en 2016 sur la thématique « Prendre soin de ceux qui nous soignent », dont on peut retenir notamment : – l’observatoire national de la QVT, installé en juillet 2018 et dont la mission est de produire des connaissances et des recommandations en valorisant les travaux et données disponibles, y compris sur le terrain. Des groupes de travail réunissant les acteurs de la santé et du médico-social, y compris les étudiants et internes en médecine, vont se tenir tout au long de l’année 2019, sur des thèmes identifiés, tels que l’impact des restructurations ou des nouvelles technologies. – La nomination de médiateurs régionaux, susceptibles d’intervenir à la demande des établissements ou des professionnels pour mener une conciliation à l’aide d’un comité de pairs, en cas de confit non résolu relatif aux conditions de travail et qui seront mis en place cette année. En ce qui concerne plus particulièrement les étudiants et internes en santé, suite à la remise du rapport du Dr Donata Marra en avril 2018 sur « la qualité de vie des étudiants en santé », lequel dresse le constat des importantes difficultés qu’ils rencontrent au cours de leur formation, quinze engagements ont été pris pour l’amélioration des conditions de vie des étudiants en santé. Dans ce cadre, la ministre a notamment annoncé : – la formation des personnes ressources au dépistage
des signes de souffrance mentale, – l’identification et la communication des procédés de circuits courts d’obtention d’avis psychiatriques pour les étudiants en santé, dans le respect de la confidentialité. – l’évaluation systématique des lieux de stage par les étudiants, et ce, dans toutes les filières. Ces évaluations devront permettre, le cas échéant, de déclencher une procédure de réexamen de l’agrément ou des conventions des terrains de stage. – la mise en place d’une coordination nationale et régionale pour mesurer, repérer et partager les bonnes pratiques. Cette coordination sera assurée par un centre national d’appui, en lien avec les associations étudiantes, tel que recommandé dans le rapport du Dr Marra. Ce centre aura pour objectif d’organiser la formation pour les enseignants et les étudiants, d’identifier les facteurs de risques psychosociaux propres aux étudiants et de proposer un site d’informations et de formations. Mais l’objectif du bien-être et de la qualité de vie des étudiants en santé est aussi au centre de la réflexion engagée pour une transformation profonde des études de santé qui restent à ce jour fortement sélectives.
Cette réforme est à l’oeuvre aujourd’hui puisque le projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé est discutée actuellement à l’assemblée nationale et prévoit notamment la suppression du numerus clausus. Enfin, pour pallier les difficultés structurelles auxquelles fait face la médecine du travail depuis plusieurs années, ont été mis en place en 2015 des équipes pluridisciplinaires de santé au travail, coordonnées par les médecins du travail et chargées de compléter leurs actions par la mise en oeuvre de compétences spécifiques. Les textes relatifs à la santé au travail seront appelés à évoluer afin d’améliorer les dispositifs de prévention existants et de renforcer la vigilance de ces équipes pluridisciplinaire vis-à-vis des jeunes professionnels médecins.