Question n° 6003 soumise le 27/02/18 au Ministère de l’économie et des finances
M. Jean-Michel Jacques attire l’attention de M. le ministre de l’économie et des finances sur la situation fiscale des « Américains accidentels ». En 2010, les États-Unis ont adopté loi FACTA (Foreign account tax compliance act), dans le cadre de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale. Si les objectifs de cette loi sont louables, puisqu’il s’agit de traquer les fraudeurs aux services fiscaux des États-Unis, ses effets sur des milliers de Français sont extrêmement compromettants. En effet le Parlement français a promulgué en 2014 la loi dite FACTA, en autorisant l’accord franco-américain, ce qui permet à l’administration fiscale américaine de demander aux banques françaises des informations sur la situation de leurs clients désignés comme ayant des indices d’américanité. Des Français dits « Américains accidentels », nés sur le sol américain de façon fortuite, mais arrivés très jeunes en France sont également concernés. Depuis la promulgation de la loi FACTA, les banques ont commencé à adresser à ces « Américains accidentels » des courriers leur demandant de bien vouloir attester de la régularité de leur situation fiscale, vis-à-vis de l’administration fiscale américaine. La situation s’est dégradée ces derniers mois puisque de nombreuses banques françaises refusent aujourd’hui à ces personnes l’accès aux services bancaires, refusant ainsi de prendre le moindre risque sous la menace de sanctions pécuniaires. Aussi, il lui demande, si le Gouvernement envisage de mener une action diplomatique forte favorisant le vote d’une disposition législative américaine ad hoc, afin d’obtenir un traitement dérogatoire pour les « Américains accidentels », leur permettant, soit de renoncer à la citoyenneté américaine par une procédure simple et gratuite, soit d’être exonérés d’obligations fiscales américaines. Cette initiative pourrait être menée parallèlement à une négociation avec les banques françaises afin qu’elles puissent assurer à ces personnes l’ensemble de leurs services.
Réponse publiée le 29/05/18
En matière de fiscalité, les États-Unis appliquent le principe de l’imposition sur la base de la citoyenneté, celle-ci pouvant s’acquérir par la seule naissance sur le sol américain. Les citoyens français, qui ont aussi la nationalité américaine, sont ainsi tenus, par le droit américain, de procéder à une déclaration de leurs revenus, auprès des services fiscaux de ce pays, et, d’acquitter les impôts dus sous réserve de franchises applicables. Il en va d’ailleurs de même pour tous les citoyens américains résidant en France. Il s’agit là d’un principe ancien. Une convention fiscale bilatérale ayant été conclue, entre la France et les États-Unis, en vue d’éviter les doubles impositions, ce n’est que dans les cas où l’impôt français est inférieur à celui dû aux États-Unis ou que certains revenus ne sont pas imposés, de façon effective, en application du droit fiscal français et sont, par ailleurs, taxables selon la législation des États-Unis qu’une imposition complémentaire peut être demandée par les autorités fiscales américaines. Le 14 novembre 2013, la France a signé un accord intergouvernemental, dit « accord FATCA », relatif au respect des obligations fiscales concernant les comptes étrangers. Entré en vigueur le 14 octobre 2014, cet accord fixe un cadre pour l’échange automatique et réciproque d’informations fiscales entre la France et les États-Unis. A défaut, la loi « FATCA » (Foreign Account Tax Compliance Act) que les États-Unis ont adoptée, en 2010, aurait obligé tous les établissements financiers à transmettre directement, à l’administration fiscale américaine, des informations détaillées sur les comptes détenus directement ou indirectement par des contribuables américains. Ainsi, l’administration américaine dispose d’informations plus exhaustives sur l’ensemble des ressortissants américains, dont les « Américains accidentels », c’est-à-dire certains citoyens français ayant également la nationalité américaine, notamment, du fait de leur naissance sur le sol américain, mais n’ayant pas de liens particuliers avec les États-Unis. Cette administration considère qu’en application de la législation des États-Unis, les « Américains accidentels » auraient dû accomplir les démarches déclaratives incombant à tout ressortissant américain. Cette problématique ne concerne pas les seuls binationaux français : le Mexique et le Canada sont particulièrement concernés, de même que d’autres États, notamment, européens. Le Gouvernement, par le biais du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, a sollicité l’attention des autorités américaines sur ces situations particulières et plaidé en faveur d’une renonciation facilitée à la nationalité américaine pour ces « Américains accidentels », étant entendu que les conditions d’octroi de la nationalité et le principe de l’imposition, sur la base de la citoyenneté, relèvent de la compétence souveraine des États-Unis. Un courrier a également été adressé au secrétaire au Trésor américain, le 8 mai 2017, par la présidence de l’Union européenne, appelant son attention sur les difficultés concrètes, rencontrées par certains citoyens européens ayant également la nationalité américaine. Les représentants de l’administration fiscale française ont, par ailleurs, engagé des contacts et un dialogue avec les services fiscaux américains, pour proposer que dans les situations où, comme c’est le cas pour les « Américains accidentels », les liens avec les États-Unis sont ténus, la procédure de renonciation à la nationalité soit rendue, plus simple et moins coûteuse, au regard des obligations fiscales qui en découlent. La France est, à cet égard, l’un des États les plus mobilisés et espère des avancées concrètes de la part des autorités américaines. C’est pourquoi le dialogue sera poursuivi. Enfin, le Gouvernement reste vigilant, quant au respect par les banques de leurs obligations, à l’égard des personnes de nationalité américaine, afin que le droit au compte leur soit reconnu et soit appliqué de manière effective. A cet égard, il est rappelé qu’il existe une procédure de recours, devant la Banque de France, permettant de contraindre une banque à accepter l’ouverture d’un compte, l’établissement étant alors désigné par la Banque de France.